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Santé mentale

Gestion clinique de l'épisode de soins

La gestion clinique de la crise demeure la priorité à l’urgence. Elle relève à la fois de l’équipe sur place et de celle en santé mentale, qui peut être appelée en consultation au besoin.

Afin d’optimiser la prise en charge (PEC) des usagers et d’assurer la fluidité de leur épisode de soins et de services, il est pertinent de rappeler qu’une demande de consultation professionnelle, avec une agente de liaison ou une infirmière clinicienne en santé mentale, par exemple, peut être faite rapidement au cours de l’épisode de soins et services de l’usager. Les soins impliquant une collaboration plus étroite entre les psychiatres et les autres prestataires de soins et de services peuvent aussi favoriser l'amélioration de la qualité des services offerts en santé mentale (Fleury et coll., 2019a). L’implication du psychiatre ou du professionnel répondant en santé mentale peut contribuer à une PEC cohérente et de qualité en accord avec les meilleures pratiques cliniques.

L’intégration du modèle de soins et services par étapes, en cohérence avec le Programme québécois pour les troubles mentaux (PQPTM), veille à ce que les usagers reçoivent le bon service, au bon moment, par le bon intervenant. L’application de ce modèle permet d’adapter la réponse aux besoins particuliers de chaque individu en fonction de leur nature et de leur gravité.

Cette PEC peut diminuer la durée de séjour en orientant l’usager vers les ressources adéquates en fonction de sa raison de consultation et des besoins identifiés. D’ailleurs, les mécanismes d’accès en santé mentale (MASM) peuvent jouer un rôle significatif dans l’orientation des usagers. Grâce à une connaissance approfondie des services disponibles et des trajectoires de soins, les MASM aident à diriger rapidement les personnes vers les ressources appropriées en fonction de leurs besoins.

Une gestion intégrée de l’épisode de soins et de services prenant en compte les besoins de cette clientèle améliore l’efficacité du traitement, favorise la récupération, réduit la durée du séjour et la fréquence des hospitalisations ultérieures (Gabet, Zao et Fleury, 2022).

Évaluation complète – triage et sécurité

L’évaluation complète au triage permet d’établir un niveau de priorité basé sur des critères établis. Il est essentiel d’interpréter le résultat de l’ÉTG avec discernement, en s’appuyant sur le jugement clinique et en tenant compte de la situation rencontrée.

La durée de l’attente, particulièrement dans une salle d’attente achalandée, est susceptible d’exacerber l’état de crise ou d’instabilité de certains usagers. En effet, selon une étude de El-Mallakh et coll. (2012), les usagers nécessitant des soins d’urgence pour des raisons de santé mentale ont montré une augmentation significative de leur état d’agitation dans les environnements surpeuplés. Les usagers présentant des signes de perturbation ou de rupture du fonctionnement (psychose, crise suicidaire, détresse extrême, agitation incontrôlable, intoxication, sevrage, etc.) devraient être conduits depuis le triage dans un lieu calme et accueillant. À cet effet, l’urgence devrait mettre à la disposition de l’usager un espace adapté à ses besoins pour améliorer la perception de l’expérience vécue aux urgences (Morphet et coll., 2012). La pertinence d’orienter les usagers vers un secteur avec la présence constante d’un membre du personnel tel qu’un préposé aux bénéficiaires ou un agent de sécurité devrait également être considéré en fonction de la situation. Par exemple, cela peut être pertinent pour les usagers en crise ou ayant des idées suicidaires. Cette mesure permet d’assurer la sécurité de ces derniers, des autres personnes présentes ainsi que du personnel de l’urgence. Un emplacement de civière visible depuis le poste de garde peut être envisagé. Toutefois, il est essentiel de veiller à ce que cette surveillance étroite ou indirecte n’accentue pas l’anxiété et l’agitation de la personne, mais contribue plutôt à sa sécurisation.

Il peut arriver que l’usager ne collabore pas avec l’intervenant assurant la surveillance. Le personnel doit alors travailler en partenariat avec la personne et ses proches pour trouver des solutions afin d’éviter de compromettre sa sécurité. Afin de résorber la crise et d’instaurer une relation d’aide et de confiance, différentes solutions peuvent être envisagées de concert avec l’usager telles qu’un changement d’intervenant.

Pour sa protection et afin d’éviter des blessures à lui-même ou à autrui, l’usager agité ou qui pense au suicide pourrait être conduit dans une salle qui est exempte de matériel pouvant être lancé, ingéré ou pouvant servir de menace.

Dans le cas où l’usager répondrait positivement aux critères de repérage de risque suicidaire, des mesures de protection doivent être mises en place. Des informations additionnelles sur la prévention du suicide sont disponibles dans les Guides pratiques et fiches synthèses en prévention du suicide.

Usager consultant pour la première fois à l’urgence pour des raisons de santé mentale

Le premier contact avec l’urgence peut souvent être stressant. Pour les usagers présentant des symptômes associés aux troubles mentaux, cette expérience peut parfois s’avérer traumatisante et entraîner des répercussions significatives sur leur parcours de soins et de services. Les personnes en état de crise se sentent souvent désemparées, anxieuses. Elles éprouvent un grand besoin d’interactions positives avec le personnel, comme être écoutées, prises au sérieux et traitées avec compassion (Roennfeldt et coll., 2021).

De plus, certains usagers peuvent ne pas être familiers avec le fonctionnement du système de santé ni avec les soins ou les services disponibles, ce qui peut accroître leur anxiété s’ils ne reçoivent pas rapidement des réponses à leurs questions. Comme les expériences négatives aux urgences ont une influence sur la future recherche d’aide, il est essentiel, comme pour tous les usagers que le personnel réponde de manière appropriée et empathique aux besoins de ces personnes.

Stigmatisation structurelle et autres formes de stigmatisation

Voir la section Dépendance.

Personne connue des services du RSSS

Certains usagers ont appris à identifier les signes précoces d’une crise et à les contrôler par divers moyens. À ce moment, selon l’INSPQ, l’urgence peut représenter le dernier recours lorsque « toutes les autres ressources ont été épuisées ou sont inaccessibles ». Lors de leur consultation, ces personnes et leurs proches peuvent alors être exténués. Que la problématique de santé mentale se produise de manière occasionnelle ou répétée, le personnel doit être sensible à ces situations et prendre en considération l’ensemble des besoins de l’usager.

Dans certaines situations, le personnel de l’urgence et ses intervenants psychosociaux doivent établir des plans de soins et proposer des services individualisés en collaboration avec les intervenants au dossier, ainsi qu’avec l’usager et ses proches. Cela permet de répondre aux besoins de la personne et, parallèlement, de réduire ses visites à l’urgence en proposant des alternatives, comme un plan au moment de la crise ou de la rechute. Cette collaboration est essentielle afin de réduire le recours à l’urgence.

Personne consentante et apte à consentir

Voir la section Principales dispositions de la loi liées au consentement.

Voici quelques principes de la PEC des personnes consentantes et aptes à consentir aux soins à l’urgence :

  1. Accueil initial
    • S’adresser d’abord à la personne, qu’elle soit seule ou accompagnée (par un proche, un ambulancier, une intervenante…).
    • S’informer sur la raison de sa visite, son point de vue sur la situation et ses besoins.
  2. Gestion de la personne accompagnatrice
    • Vérifier le lien entre la personne et la personne qui l’accompagne.
    • Recueillir les informations ou les observations pertinentes auprès de la personne accompagnatrice.
    • Au besoin, demander à la personne accompagnatrice de rester jusqu’à la PEC, ce qui inclut la rencontre avec le médecin.
  3. Situations particulières
    • Personne seule : évaluer sa capacité à rester dans la salle d’attente. Si nécessaire, l’installer dans un endroit plus calme et sécuritaire (salle d’attente réservée, bureau de consultation, salle d’examen…).
    • Personne attendue par un psychiatre : l’informer du temps d’attente prévu.

Personne inapte à consentir, mais qui ne s’oppose pas aux soins et aux services de façon catégorique, et personne de moins de 14 ans

Voici quelques principes de la PEC des personnes n’étant pas en mesure de consentir à leurs soins à l’urgence :

  • Avant de commencer un soin ou un service, le professionnel évalue la capacité de l’usager à consentir selon les cinq critères de la Nouvelle-Écosse.
    Pour déterminer si l’usager est en mesure de consentir à ses soins, il faut vérifier :
    • si la capacité à consentir est compromise ou non par la maladie;
    • s'il comprend :
      • la nature de sa maladie,
      • la nature et le but du traitement,
      • les risques associés à ce traitement,
      • les risques encourus s’il n’accepte pas le traitement.
  • Si l'usager est inapte à consentir, une vérification au Registre public des mesures de représentation du Curateur public Ce lien ouvre une nouvelle fenêtre. est effectuée.
  • Si l’usager est représenté légalement, le professionnel contacte la personne qui le représente afin d’obtenir le consentement au soin substitué.
  • En l’absence d’un représentant légal, le professionnel contacte une personne pouvant consentir à ses soins de façon substituée selon l’article 15 du Code civil du Québec, par ordre de priorité :
    • partenaire conjugal (marié, union civile ou union de fait);
    • proche parent;
    • personne qui démontre un intérêt particulier pour l’usager
  • Si l'usager est totalement isolé, le Curateur public du Québec peut consentir aux soins à titre de personne intéressée de dernier recours, pour la personne inapte à consentir qui n’oppose pas de refus catégorique (voir la section Consentir à des soins de santé en cas d’inaptitude du Curateur public du Québec).
  • Si l’usager a moins de 14 ans, selon l’article 14 du Code civil du Québec, il ne peut pas consentir à ses soins par lui-même. L’autorisation des parents ou du tuteur est requise pour tout soin. Cependant, en cas d’urgence, si les parents ou le tuteur ne peuvent pas être contactés à temps, le personnel médical peut prodiguer les soins urgents nécessaires sans leur consentement préalable.

Personne emmenée en vertu de la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui (RLRQ, chapitre P-38.001)

Une personne emmenée par transport forcé sous l’article 8 de la Loi sur la protection des personnes (LPP) par un agent de la paix en raison du danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui que pose son état mental est considérée comme une urgence médicale. Les établissements de santé et de services sociaux (ÉSSS) doivent alors se référer à leur protocole de mise sous garde. Ce protocole doit traduire en actions les orientations ministérielles contenues dans le Cadre de référence en matière d’application de la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui – Garde en établissement de santé et de services sociaux (ci-après « Cadre de référence »). Voici quelques principes de la PEC d’une personne emmenée sous la LPP :

  • Dès l'arrivée de l’usager accompagnée par un agent de la paix, un membre du personnel doit le prendre en charge. Une fois l'échange d'informations avec le personnel infirmier terminé, la responsabilité de l'établissement commence, libérant ainsi l'agent. Toutefois, c'est à ce dernier de décider s'il doit rester pour des raisons de sécurité ou si l’usager est en état d'arrestation ou de détention.
  • Le personnel infirmier au triage doit, dans l’intervalle, prendre les mesures de surveillance appropriées à la condition et aux besoins de l'usager.
  • Dès la PEC médicale, l’usager peut, malgré l’absence de consentement, sans autorisation du tribunal ni examen psychiatrique préalable, être mis sous « garde préventive » pour un maximum de 72 heures.
  • Dès la PEC médicale, ou dès que l’usager semble en mesure de comprendre ces renseignements, il doit être informé du lieu où il est gardé, du motif de cette garde et du droit qu’il a de communiquer immédiatement avec ses proches et avec un avocat. Il faut lui remettre le dépliant intitulé Droits et recours des personnes mises sous garde.
  • Il faut procéder sans délai à l’examen de l’usager par un médecin ou une infirmière praticienne spécialisée (IPS). Si le médecin ou l’IPS est d’avis que l’état mental de l’usager présente un danger grave et immédiat pour lui-même ou pour autrui, la garde est maintenue et le processus de mise sous garde en établissement se poursuit. Le médecin ou l’IPS avise le directeur des services professionnels (DSP) de la mise sous garde de la personne.
  • S’il s’agit d’une personne mineure, il faut aviser la personne titulaire de l’autorité parentale ou, à défaut, le tuteur, de la décision de mettre la personne sous garde préventive.
  • S’il s’agit d’une personne majeure représentée, il faut aviser le représentant légal de la personne. On peut chercher ce dernier au Registre public des mesures de représentation Ce lien ouvre une nouvelle fenêtre. du Québec.
  • Le médecin doit statuer, dans les premières heures de la garde préventive, sur la pertinence de procéder à une évaluation psychiatrique visant à déterminer la nécessité de prolonger la garde. Si tel est le cas, il doit en informer le DSP ou le contentieux de l’ÉSSS. L’établissement dispose de 24 heures pour décider de prolonger la garde au-delà des 72 heures et entamer les procédures judiciaires pour demander une « garde provisoire » lorsque la personne refuse de rester à l’ÉSSS et de se soumettre à une évaluation psychiatrique alors que son état mental présente toujours un danger.
  • La garde préventive peut prendre fin dans l’une de ces trois situations :

    • le médecin atteste que la garde n’est plus nécessaire;
    • le délai des 72 heures est expiré;
    • l’usager consent à rester à l’ÉSSS pour y recevoir les soins, y compris une évaluation psychiatrique.

    Le titulaire de l’autorité parentale, le tuteur s’il s’agit d’une personne mineure ou le représentant légal s’il s’agit d’une personne majeure représentée doit être avisé de la fin de la garde.

Réponse aux besoins et protection des droits de la personne

En contexte de crise, il est crucial de répondre rapidement aux besoins des usagers en raison de leur vulnérabilité et des risques inhérents à de telles circonstances. Il est essentiel d’instaurer des pratiques basées sur la primauté de la personne qui implique le respect de sa personnalité, de sa façon de vivre, de ses différences et des liens qu’elle entretient avec son environnement. La qualité de l’accueil et le respect de l’usager et de ses droits ainsi que ceux de la personne qui l’accompagne sont également primordiaux. À cet égard, la mobilisation du réseau social entourant l’usager est encouragée dans le but d’optimiser les mécanismes d’adaptation existants.

L’expérience montre que, même en état de grande détresse, les usagers concernés peuvent et souhaitent collaborer à la définition de leurs besoins, et ce, même lorsque leur capacité à communiquer ou à se contrôler est temporairement diminuée. Ils sont également capables d’exprimer leurs préférences et de suggérer des accommodements minimaux pouvant atténuer leur état de crise.

Voici quelques-unes des préoccupations et des interrogations exprimées par les personnes et leurs proches parmi les plus importantes (Clarke, Dusome et Hughes, 2007; Clarke et coll., 2014; Navas et coll., 2022; Olthuis et coll., 2014) :

  • Elles souhaitent être écoutées, crues et acceptées dans leur souffrance.
  • Il est essentiel de garantir que leurs droits et leurs recours seront respectés. Les interventions devraient prioriser l’écoute active et l’interaction avec la personne, plutôt que de se concentrer uniquement sur la sécurité.
  • Les interventions coercitives, souvent décrites comme traumatisantes, ne devraient être utilisées qu’en dernier recours, favorisant une approche plus humaine et compréhensive dans le traitement des crises (mesures alternatives).
  • Les interventions doivent être exemptes de toute forme de stigmatisation ou de discrimination.
  • Les préoccupations de santé mentale doivent être considérées comme aussi importantes que celles d’ordre physique.
  • Les besoins des personnes doivent être évalués de manière holistique, englobant à la fois la santé mentale et physique.
  • Les plaintes physiques des personnes doivent être prises au sérieux et ne pas être négligées ou minimisées en raison d’un diagnostic de santé mentale antérieur (masquage diagnostique).
  • Les personnes souhaitent obtenir des informations sur les ressources communautaires et les services disponibles après leur départ de l’urgence.

Selon le Guide de bonnes pratiques pour l’implication des proches en santé mentale, les trois besoins essentiels répondant aux préoccupations des proches sont : être considéré, être intégré, être outillé.

Comorbidités

Les troubles mentaux sont souvent associés à d’autres problèmes qui peuvent en accentuer la gravité et la complexité. Citons, à titre d’exemple, les problèmes sociaux tels que la pauvreté ou les problèmes d’hébergement, les troubles liés aÌ€ l’utilisation de substances psychoactives (TUS), les problèmes de comportement et ceux de santé physique. Les traitements auprès des personnes présentant des comorbidités sont complexes. Ils peuvent être moins efficaces si les soins pour chaque condition sont planifiés de façon isolée (Gaulin et coll., 2019). Il est donc essentiel d’adopter une approche intégrée qui prend en compte l’ensemble des besoins physiques et mentaux des usagers.

Les problèmes de santé physique peuvent contribuer à la détérioration de la condition mentale, en compliquer le traitement ou en être la cause. Une évaluation physique de tous les usagers qui consultent pour des symptômes associés à un trouble mental est incontournable afin d’éliminer toutes les causes physiques au préalable.

Dernière mise à jour : 16 juin 2025

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